Huautla de Jimenez - Sierra mazateca - 30 juin 2007
Avec armes et bagages, j'ai donc quitté Cuernavaca, Gigi et Lolo. Après 3 signes de croix du chauffeur, le bus a démarré, direction Puebla. Comme sur toutes les grandes lignes, la télé s'est élégamment dépliée, et le film a démarré : un navet américain avec sous-titres en espagnol, navigant entre violence et mélodrame.
Samedi matin, le voyage s'est poursuivi en voiture : sous la bonne conduite de Luis, nous sommes partis en petit groupe pour aller à Huautla Jimenez, une localité perchée haut, très haut dans la Sierra mazateca - endroit mythique s'il en est, car les Beatles, Bob Dylan et bien d'autres sont passés par là. Pourquoi donc ? pour les Ninos, les petits enfants, autrement dit : les champignons hallucinogènes. Certaines personnes du groupe y allaient pour en consommer, précisément; quant à moi, j'espérais y rencontrer - enfin ! des années après son premier appel - la Ska Pastora, appelée aussi Salvia divinorum, une très lointaine cousine de notre sauge officinale.
Depuis Puebla, nous avons très vite traversé un paysage étonnant, à la fois semi-désertique et avec de grandes étendues vertes de cultures de canne à sucre. Au pied de la Sierra, nous avons traversé le village de Coxcatlan, berceau du maïs cultivé tel que nous le connaissons aujourd'hui. C'est dans des grottes de la région que les semences d'origine ont été découvertes. La route a commencé à serpenter très fort et à grimper dans le versant aride de la Sierra. Subitement, au détour d'un virage, changement total : nous étions sur l'autre versant, vert, foisonnant, une semi-jungle. La Sierra est souvent très à-pic et en regardant bien, on y découvre des habitations depuis le fond du ravin jusque tout en haut, avec des champs cultivés. Les plus grandes localités sont éparpillées sur une grande étendue et les différents chaînes se succèdent à l'infini. C'est un spectacle absolument magnifique. J'ai trouvé les gens indifférents ou aimables, très rarement hostiles. Le Mazatèque est une langue extrêmement raffinée, faite de nuances subtiles, et très douce à entendre.
Luis m'avait dit que j'aurais beaucoup de peine à trouver la Ska parce que les autochtones gardent jalousement le secret des endroits où elle croît. En plus, la cérémonie pour la prendre de manière traditionnelle est passée de parents à enfants et, contrairement au 'tourisme champignons', les étrangers sont totalement exclus, disait-il. On m'avait aussi dit que la Ska était devenue le monopole des Américains et que je n'avais donc aucune chance.... Bref - j'ai insisté pour aller voir sur place : tête dure, déterminée et... sûre d'être bien guidée par l'Univers. Bien m'en a pris : nous l'avons trouvée - c'était un moment de grande émotion pour moi, une rencontre tant attendue. Nous avons grimpé dans la montagne, c'était raide raide raide. Et nous sommes arrivés à une habitation en adobe, tout ce qu'il y a de plus rudimentaire, avec le couple âgé qui bichonnait les buissons de Ska poussant sur leur terrain. Nous avons même pu en acheter. La prise rituelle avec cérémonie sera pour une autre fois, nous avons rencontré un couple qui nous conduira auprès d'une chamane sérieuse, sans précipitation. Car la Ska est une histoire de femme.... En attendant, Rita (elle était aussi de la partie) et moi, nous la sommes attachée sur le front. L'effet ne s'est pas fait attendre : une communication immédiate avec l'esprit de la plante, une énergie douce et puissante, d'amour et de compassion, nous a enveloppées si fort que nous en avions les larmes aux yeux. Je suis d'une gratitude sans fin : après seulement six semaines au Mexique, un de mes voeux les plus chers s'est réalisé ! En plus, c'était jour de pleine Lune - impossible de faire mieux pour rencontrer la Ska pastora....
Il fallait malheureusement déjà rentrer le lendemain dimanche, mais c'est sûr que je retournerai dans la Sierra mazateca, si possible pour des vacances avec marche dans la montagne et pour retrouver ma nouvelle alliée ! Demain : départ pour Oaxaca.
Quelques photos pour partager avec vous ce weekend magique.
route de Puebla en direction de la Sierra
de l'autre côté de la route, la canne à sucre remplace les cactus
versant aride
versant verdoyant,
ondulant,
"junglant"
et plongeant.
Luis négocie le prix des "Ninos" avec Don Constantino - remarquez l'emballage dans une grande feuille pour que les champignons restent frais.
ma pourvoyeuse de Ska Pastora....
....que voici.
Bye bye Sierra Mazateca !
et pour notre char, un p'tit coup pour la route aux couleurs de Shell !